Balzac La Comédie Humaine Analyse de texte Etude de l'œuvre 100 analyses de texte de la Comédie Humaine de Balzac Description détaillée des personnages Classement par 7 types de scènes 26 tomes étudiés en détail

Une fille d’Eve

LA COMEDIE HUMAINE – Honoré de Balzac IIe volume des œuvres complètes de H. DE BALZAC par Veuve André HOUSSIAUX, éditeur, Hébert et Cie, Successeurs, 7, rue Perronet, 7 – Paris (1877) 

Scènes de la vie privée Picture 1  

UNE FILLE D’EVE     

Nouvelle publiée dans le journal le Siècle en janvier 1839  

Analyse de l’oeuvre   Une fille d’Eve est une longue nouvelle qui fut d’abord publiée en feuilleton dans le journal le Siècle en décembre 1838 et janvier 1839, puis en deux volumes in-8°, chez l’éditeur Hippolyte Souverain en août 1839, puis dans l’édition Furne de 1842 où il prend place dans les Scènes de la vie privée de La Comédie humaine. Une fille d’Eve est un titre qui ne signifie pas grand-chose. Balzac l’avait noté sur un album qu’il appelait son « vivier », en 1832, alors qu’il rassemblait des titres pour une collection d’ « études de femmes » qu’il avait en projet à cette époque. Puis, il n’y pensa plus. La longue nouvelle ou le roman qu’on lit aujourd’hui sous ce titre, qui fut publiée en décembre 1838 est trop considérable pour prendre place parmi les « études de femmes » : elle est à mi-chemin entre les Scènes de la vie parisienne auxquelles elle appartient par les personnages qu’elle met en scène et les Scènes de la vie privée auxquelles elle se rattache par la moralité qu’elle présente : une jeune femme doit se défendre contre les entraînements que l’admiration ou l’enthousiasme peut provoquer. En réalité, elle est surtout un exemple de l’apparentement qui s’établit après 1835 entre les différentes oeuvres de Balzac grâce à la réapparition des personnages. C’est d’abord le lendemain d’une histoire dont le début est raconté dans Une double famille, nouvelle parue en 1830. Les Grandville, lui, procureur général, elle, pieuse épouse, ont eu deux filles qui ont été élevées dans les principes de dévotion professés par leur mère : ignorance complète, mariage imposé, vie mondaine facile et heureuse, mais aucune expérience, aucune défiance, un coeur inoccupé. Une rencontre émeut une de ces oies blanches. Elle laisse aller son imagination et rêve un peu trop à un robuste grand homme, abrupt, laid, puissant, qui lui paraît l’image même du génie. Son imagination l’emporte, comme Eugénie Grandet, comme Rosalie de Watteville d’Albert Savarus, elle se fait un héros et elle se fait un roman. Des circonstances qui font appel à son dévouement et à sa générosité la mettent en danger. Elle est sauvée par l’habileté et la tendresse de son mari au moment où elle allait être gravement compromise. Nous nous éloignons par cette intrigue de l’orbite d’Une double famille, qui raconte la jeunesse du procureur général Granville, mais c’est pour retrouver le sujet d’Illusions perdues, description du milieu littéraire parisien et des « illusions » qu’on se fait en province, dont la première partie venait de paraître en 1837. C’est la même aventure, mais à un autre étage social. La comtesse de Vandenesse dans un salon du noble faubourg Saint-Germain est victime de la même « illusion » que Mme de Bargeton à Angoulême quand elle se compromet avec Lucien de Rubempré : mais l’une, provinciale et empruntée, est séduite par une image primaire de la poésie, le jeune prodige de préfecture dans lequel elle croit voir Lamartine, tandis que l’autre, parisienne et plus raffinée, s’attache à la puissance, à un destin orageux, à un aigle qui s’impose aux autres hommes. En même temps que la première partie d’Illusions perdues qu’il vient d’écrire fournit à Balzac son sujet, la seconde partie d’Illusions perdues, celle qui est intitulée Un grand homme de province à Paris qu’il prépare alors, met à sa disposition le cadre parisien et les figurants de son action. Le milieu mondain dans lequel la comtesse de Vandenesse rencontre Raoul Nathan n’est évidemment pas le même que le milieu littéraire dans lequel débutera Lucien de Rubempré. Mais les figurants, les utilités, les ambitions, les instruments de l’ambition sont les mêmes. On les retrouve comme les éléments indispensables du parcours qu’on doit inévitablement suivre pour arriver au succès. C’est comme un décor que Balzac construit dans sa pensée, qui doit lui servir à la fois pour la nouvelle qu’il écrit et pour le roman qu’il prépare et dont on peut suivre l’enrichissement par les additions considérables que Balzac ajoute sur les épreuves de sa nouvelle. Ce ne sont pas les seules interférences qu’on peut constater , ce sont seulement les plus visibles. Il y en a d’autres. Félix de Vandenesse, le mari si intelligent et si tendre qui vient au secours de sa femme dans le dénouement de la nouvelle, est le personnage principal du Lys dans la vallée que Balzac a publié en 1836. Le mari de l’autre soeur, le financier Du Tillet, l’un des « loups-cerviers » de la Comédie humaine, avait fait ses débuts dans César Birotteau paru à la fin de l’année 1837.  Ainsi les romans et les nouvelles que Balzac vient de publier ou qu’il prépare, et même ceux qu’il a publiés plusieurs années auparavant lui fournissent un fonds commun, une sorte de « réservoir » dans lequel il peut puiser des personnages, des situations et des moyens. Cette société que Balzac, selon sa propre expression , « porte dans sa tête », est aussi vivante, aussi présente dans son invention que les milieux qu’il a traversés. Mais, naturellement, quand il s’agit en particulier du milieu littéraire, c’est aussi sur ses souvenirs et son expérience que Balzac peut s’appuyer. Raoul Nathan est, probablement, comme le sera plus tard le poète Canalis dans Modeste Mignon, un personnage composite. On n’a pas réussi à identifier parmi les contemporains le modèle de sa puissante laideur. Mais par bien des traits de sa carrière, il ressemble à Balzac. Son ambition d’être chef de parti, de traiter d’égal à égal avec le ministère, c’était l’ambition que Balzac avouait à Mme Hanska quand il acheta la Chronique de Paris. Sa candidature à la députation évoque les diverses tentatives de Balzac pour briguer un siège. Nathan est ambitieux pour se rendre digne de son aristocratique conquête comme de Balzac voulait se faire un rang égal à celui de Mme Hanska. L’instrument de cette ambition est un journal qui engloutit les capitaux de Nathan comme la Chronique de Paris avait englouti ceux de Balzac. Et le détail même de la catastrophe, en particulier la caution que Raoul Nathan demande à la femme aimée, est le prêt que Balzac, dans les mêmes circonstances, accepta de sa maîtresse du jour, la comtesse Guidoboni-Visconti. Balzac est méconnaissable sous le masque de Raoul Nathan : mais ceux qui connaissent sa vie ne peuvent manquer de relever ces analogies. En est-il de même pour Marie de Vandenesse ? Petite, gracieuse, elle ressemble physiquement à la « piccola » Clara Maffei, femme du poète Andréa Maffei, une des reines de Milan, à qui Balzac avait fait une cour indiscrète l’année précédente. Son mari lui avait écrit une lettre très touchante et charmante pour la mettre en garde contre les assiduités de Balzac, auxquelles elle se déroba après l’avoir reçue. Balzac eut-il connaissance de cette lettre ? Les gentils conseils de Félix de Vandenesse qui lui firent retrouver l’amour de sa femme sont comme un écho de ce savoir-vivre italien. Mais ce n’est qu’une rencontre. La situation de Balzac à Milan n’était pas du tout celle de Raoul Nathan dans la jungle parisienne. La fin de la nouvelle, un peu trop facile, un peu trop industrieuse, nous rappelle la désinvolture avec laquelle Balzac, quelquefois, se débarrasse de ses dénouements. Elle ne vaut guère mieux que le subterfuge qui assure la happy end par laquelle se termine Modeste Mignon.

L’Histoire C’est d’abord le lendemain d’une histoire dont le début est raconté dans Une double famille Les Granville, lui (Roger) procureur général, elle, (Angélique) pieuse épouse dont les deux filles Marie-Angélique et Marie-Eugénie élevées dans les principes de dévotion religieuse professés par leur mère : ignorance complète, mariage imposé, vie mondaine facile et heureuse, mais aucune expérience, aucune défiance, un cœur inoccupé. Une rencontre avec Raoul Nathan, poète, journaliste, écrivain inconnu touchant à la politique, émeut Marie-Angélique, comtesse Félix de Vandenesse. Elle laisse aller son imagination et rêve un peu trop à ce robuste grand homme, abrupt, laid, puissant qui lui paraît l’image même du génie. Son imagination l’emporte, elle se fait un héros de Nathan, et elle se fait un roman. Des circonstances qui font appel à son dévouement et à sa générosité (par amour pour Nathan) la mettent en danger. Elle demande alors l’aide financière de sa sœur, Madame du Tillet (épouse du célèbre banquier qui, à l’insu de sa femme Marie-Eugénie et, pour la petite histoire, a juré la perte de Nathan afin que celui-ci ne lui fasse de l’ombre dans ses espérances de fortune politique. Il ruinera Nathan qui, faute d’argent, abandonnera sa part dans le journal qu’il a créé). La comtesse Félix de Vandenesse est sauvée par l’habileté et la tendresse de son mari au moment où elle allait être gravement compromise. Aux Jardies, décembre 1833

Source analyse : Préface* et résumé de l’histoire: tome IV, d’après le texte intégral des œuvres de la Comédie Humaine publié par France Loisirs 1985 sous la caution de la Société des Amis d’Honoré de Balzac. *la préface est enrichie dans le premier paragraphe de notes supplémentaires issues de l’encyclopédie universelle Wikipédia. 

Généalogie des personnages Vandenesse (de) : Famille noble de Touraine, représentée par un marquis de Vandenesse, mort vers 1827. A épousé une Listomère d’où : Charles, comte puis marquis, diplomate né en 1790, épouse Emilie de Fontaine, veuve Kergarouët, d’où au moins un fils, Alfred ; Charles est aussi le père des quatre derniers enfants de Mme d’Aiglemont ; Félix, vicomte puis comte, né en 1794, épouse Marie-Angélique de Granville née en 1808 d’où : Une fille qui épouse Listomère, Une autre fille. Il faut citer en outre un abbé de Vandenesse , grand oncle des précédents. Granville : Marie-Angélique épouse de Félix de Vandenesse, fille de Roger Granville (voir Une Double famille). Nathan : (Raoul) Ecrivain et journaliste, épouse Sophie Grignoult, dite Florine. Tillet (du) : Ferdinand (dit du), enfant trouvé, puis commis, banquier, député, né en 1793. Epouse en 1831, Marie-Eugénie de Granville née en 1814.

Source généalogie des personnages: Félicien Marceau « Balzac et son monde » Gallimard.

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          La comtesse de Vandenesse

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