Madame Firmiani
LA COMEDIE HUMAINE – Honoré de Balzac Ier volume des œuvres complètes de H. DE BALZAC par Veuve André HOUSSIAUX, éditeur, Hébert et Cie, Successeurs, 7, rue Perronet, 7 – Paris (1877)
Scènes de la vie privée
MADAME FIRMIANI – « étude de femme »
Nouvelle écrite en 1831 et publiée dans la Revue de Paris en février 1832.
Analyse de l’oeuvre Madame Firmiani, écrit en 1832, s’écarte tout autant que La paix du ménage des méthodes et des personnages habituels des Scènes de la vie privée et montre la variété de ton et de procédés que Balzac employait dès cette date. C’est une touchante histoire d’amour, de désintéressement, de délicatesse entre une élégante jeune femme qui approche de la trentaine et son très jeune amant qui mène la vie austère et laborieuse du Balzac de vingt ans. Pas d’étude d’un milieu social, pas de quartier de Paris, pas de moeurs typiques, seulement des personnages à peu près sans passé et surtout cette atmosphère pure, immatérielle, interstellaire et si peu balzacienne qui convient à la peinture des nobles sentiments. Pourquoi ce changement de décor et de ton ? C’est qu’en 1832, Balzac, devenu un conteur à la mode, un collaborateur de revues élégantes, n’était plus seulement l’analyste impitoyable auquel rien de la vie conjugale n’était étranger : il était devenu « le peintre des femmes ». Cette situation enviable était si bien assurée que Jules Janin, le plus spirituel des critiques de cette époque, se moquait de cette spécialité dans laquelle Balzac était devenu imbattable et qui allait de la psychologie la plus perspicace à la connaissance la plus étendue des modes, des ceintures, des bas et des boudoirs. Balzac, à cette époque, multiplia les esquisses rapides, les « profils » féminins aussi bien dans ses nouvelles qu’en quelques pages dans les revues. Cette vocation lui parut même si avantageuse qu’il projeta de réunir ces croquis de jeunes femmes en un ensemble intitulé Etudes de femmes qui devait fournir trois jolis volumes in-8°: ils furent proposés en vain à l’éditeur Mame en cette année 1832. Madame Firmiani est l’une de ces « études de femmes ». C’est à ce groupe qu’appartiennent les trois courtes nouvelles qui l’accompagnent ici, La paix du ménage déjà citée, Etude de femme et Le message, qui parurent en librairie dans la première et la seconde série des Scènes de la vie privée. C’était toujours de la vie privée, mais à un autre étage, plus mondaine, et avec un autre personnel. Et c’était aussi pour Balzac un autre moyen de puiser dans ses souvenirs, non pas réserve d’anecdotes, mais souvenirs de son propre passé. Il n’est pas difficile de reconnaître dans la jeune femme proche de la trentaine, si fine, si délicate, mais riche d’expérience, initiatrice et dans le jeune homme de vingt ans qui est son amant, le couple formé en 1822 par Balzac, alors âgé de vingt-trois ans, et Mme de Berny, beaucoup plus âgée que lui. Cet hommage, dix ans après, était aussi un adieu. Madame Firmiani (fut publié dans la livraison de février 1832 de la Revue de Paris. Six mois plus tard, Balzac allait rejoindre une nouvelle élue de son coeur, la marquise de Castries, à Aix-les-Bains. Mme de Berny avait alors cinquante-cinq ans. La courte nouvelle qui porte ce titre d’Etude de femmes, que Balzac voulut reprendre plus tard pour son recueil de nouvelles, avait paru en février 1830 dans un luxueux mensuel, La Mode, où les « toilettes » élégantes représentées en couleurs par Devéria, étaient traditionnellement accompagnées de « scènes » spirituelles signées de noms connus. Dans ces « pochades » écrites pour les revues féminines, les auteurs se bornaient généralement à décrire avec délicatesse quelques situations de la vie mondaine. Les noms des personnages étaient souvent remplacés par des astérisques pour faire croire à des anecdotes indiscrètes. Ce fut le cas pour Etude de femme: les noms des personnages de La Comédie humaine qu’on peut lire aujourd’hui ont été attribués plus tard par Balzac pour rattacher ce récit à l’ensemble de son oeuvre. C’est donc seulement par hasard que ce conte fait partie de ces « études de femmes » que Balzac conçut plus tard, qui finalement ne parurent jamais et furent annexées au recueil des Scènes de la vie privée. Un seul trait est à retenir dans ce bref récit: c’est un croquis ironique de ces jeunes Parisiennes très pieuses de la paroisse Saint-Thomas-d’Aquin que le « redressement moral » de la Restauration avait mises à la mode à la veille de la Révolution de 1830.
Histoire C’est une touchante histoire d’amour, de désintéressement, de délicatesse entre une élégante jeune femme qui approche de la trentaine et son très jeune amant, Octave de Camps, qui mène la vie austère et laborieuse d’un professeur donnant des leçons. Madame Firmiani, sans enfant, veuve de M. Firmiani, un quadragénaire qui n’avait pu que lui offrir son nom et son immense fortune est une personne fine et délicate. Sa pureté et sa probité lui valent le respect de la haute société. Octave possédant une fortune ayant été dérobée par son père à la famille Bourgneuf, Madame Firmiani, lui demande de faire le choix entre cette fortune malhonnête et leur amour. Elle sera son juge de conscience. Octave donne des leçons de mathématiques pour restituer l’argent dérobé, rembourser la famille Bourgneuf et conquérir à jamais le cœur de sa dulcinée. Riche d’expérience, elle sera l’initiatrice de l’éducation parisienne d’Octave son amant, qui deviendra par la suite son mari, et qu’elle aime sincèrement. Paris, février 1831
Généalogie des personnages Firmiani : Receveur général disparu vers 1822. A épousé une Cadignan. Veuve elle épouse Octave de Camps. Octave de Camps : né vers 1802, épouse une Cadignan, veuve Firmiani, née avant 1797.
Source analyse/histoire : Préface extraite du tome III, recueillie d’après le texte intégral des œuvres de la Comédie Humaine publié par France Loisirs 1985 sous la caution de la Société des Amis d’Honoré de Balzac.
Source généalogie des personnages : Félicien Marceau « Balzac et son monde ».
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